29.5.11

Syracuse les yeux ouverts

18 min 30 _  VI-2011
coul. _ 4:3 _ mini-dv
musique : "In a landscape" (1948) de John Cage interprétée par Stefan Hussong, accordéon
Projection 4:3 ou
Installation triptyque "Ortygie","Hypnos","Lucie"
sur 3 écrans plasma sur 3 parois d'une petite pièce-boîte obscure
dotée de bonnes enceintes
_ Imagespassages / 29ème Festival du Cinéma Italien, Conservatoire à Rayonnement Régional (Crr), Annecy, sept. 2011
_ Imagespassages / 29ème Festival du Cinéma Italien, Bonlieu Scène nationale, Annecy, sept. 2011





Célébration de la lumière, de la mer, du lieu. Ce pélerinage visuel et sonore entre en résonance avec L’Enéide, le poème de Virgile. La partition « In a landscape » de John Cage vient poursuivre les babillages des touristes & de la mer, se substituer au paysage sonore et souligne l’intemporalité du lieu.

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O r t y g i e

où le dieu fleuve Alphée s'oublie
se mêlant à la fontaine Aréthuse
dans la mer Ionnienne
la baie de Syracuse 






 O r t y g i e




H y p n o s

Introduction de la musique à l'acccordéon
"In a landscape" de John Cage, par Stefan Hussong 



RIVISSE VIRGILIO IN CANTO LATINO
Virgile fit revivre en chant latin
I RITMI GRECI DI TEOCRITO
les rhytmes grecs de Théocrite
SIRACUSA ETERNA LA MEMORIA
Syracuse en immortalise la mémoire
PRESSO LE MELICHE ACQUE DI ARETUSA
près des eaux méliques d'Aréthuse
DI FRONTE AL PLEMMIRIO ONDOSO
face aux vagues du Plémyre
 




 L u c i e


Merci à Alessandra Crainz
pour ses transcription/traduction
de la plaque du bimillénaire de Virgile
à Syracuse

1.2.11

Pié-Foulard — Invitation à Stefan Hussong

12 min _ 16/9ème _ mini-dv _ couleur
filmé le 31/XII/2010 à Prailles, Monastère de l'Annonciation 
















Cette séquence muette respire. Silence de l’animal. Silence de l’hiver. Retraite — hibernation — refuge d’un corps endormi — d’où il puise sa force. Ce plan séquence bouge de haut en bas,
de bas en haut, en attente du mouvement de l’accordéon : souffle, gémissement du génie de l’hiver. Un bercement peut se muer en arrachement. Un animal peut être créé par ce rapport entre les images et la musique à composer : le geste animal de l’accordéoniste lui-même en symbiose avec son instrument…

Poser le décor : quel paysage ? quelle situation ? : 1er plan-séquence (rush qui introduit à cette vidéo mais n'est pas montré ici; plan-séquence réservé pour Machina perceptionis — à suivre…)

J’étais d’abord sortie de ma chambre, confortable cellule pour une retraite.
La baie vitrée s’ouvre sur la campagne, de plain-pied.
Un après-midi de décembre à Pié-Foulard.
La promenade ne me disait rien, ce jour-là. L’hiver, dehors.
Je m’étais appuyée contre le grand volet de bois —tout le corps le pousse quand on l’ouvre—, pour regarder le paysage avec la caméra.
Me laisser imprégner par la présence des arbres
D’abord, zoomant sur le faible soleil, si intense pourtant, derrière les branchages
Laisser la lumière s’imprimer, donner corps au temps sur la pellicule digitale.
La lumière qui n’aveugle pas, blanche pourtant
De lents mouvements panoramiques
D’autres zooms, entrées en profondeur, dessins des branches dans le ciel.
Les oiseaux, le vent, un bruit de moteur (tracteur).
Je terminais ce plan en contre-plongeant à nouveau droit sur le frêle soleil, jouant avec les branches nues, balancées, parfois.
Des couleurs nouvelles, un motif lumineux se baladait, comme pris dans la lentille de la caméra.
Le motif dansait.




2cd plan-séquence, 12 minutes, le tableau filmé muet en attente de sa musique

Je franchis à nouveau le seuil par la porte vitrée.
Retour à la chaleur de la chambre, ronronnement constant du chauffage.
Je me suis assise dans le fauteuil, face au paysage de la campagne, face au soleil se couchant imperceptiblement derrière les branches.
Coupée du son de l’extérieur par la grande baie vitrée elle-même.
Visuel pur.
Tableau en mouvement muet.
La lumière ne cessait d’évoluer. Le vent ne cessait de remuer les branches noires, de temps à autres.
Assise dans le fauteuil, je rallumai la caméra dans ma paume, contre mon ventre devant le plexus solaire.
Mouvement de ma respiration transmis à l’image.
Le cadrage se balance, de temps à autre, de bas en haut, ou de haut en bas.
Pas de son. La baie vitrée devant moi est un pare-son, elle isole parfaitement des bruits de la campagne.
Silence de la retraite. 
Lecture. Respiration.
L’image respire alors, indépendamment du lieu que je filme, c’est mon corps qui lui transmet ce rythme du souffle.










C’est pourquoi j’invite Stefan Hussong à me donner la respiration de son instrument sur ces 12 minutes. Qu’il interprète avec son corps en symbiose avec son instrument, le son de ces images,
cette respiration, ce refuge,
de calme et d’intensité,
de presqu’aveuglement,
d’inquiétude discrète…








Quelque chose de tendre et animal
Une retraite : un animal respire dans les broussailles où il a trouvé refuge.
Sorte de mi-sommeil, semi-hibernation
Chaleur animale dans son hibernation. Il a ouvert les yeux et sent la faible chaleur du soleil d’hiver.






Faire gémir l’accordéon, l’entendre souffler —plainte dans l’hiver & plaisir du sommeil—
Semi-conscience de l’endormissement
Un bercement, celui du souffle de l’animal-instrument lui-même.
Silence de l’animal. Silence de l’hiver.
Retraite  —hibernation— refuge du corps dans le sommeil —où il puisse sa force
Refuge dans le corps, dans le souffle ralenti
Ralentissement des fonctions vitales
Respiration profonde










Un animal tapi dans sa cachette au cœur de l’hiver
L’animal qui est une partie de Dieu —créature de Dieu— « frère Ours », « frère Loup » … de saint François d’Assise. Sœur Biche…






L’instrument est une partie du corps du musicien, c’est si profond avec Stefan Hussong, cette capacité à faire corps avec son accordéon, amoureusement, être en symbiose.
Comme avec la caméra dans la paume, mon souffle se transmet à l’image.




Un animal a été créé par ce rapport.




Je demande à Stefan de créer le souffle, le gémissement…
le rythme sonore de la vie de cet animal en hibernation…




Musicien-animal-instrument : son à l’accordéon : musique : souffle
Filmeuse-animal-caméra : image : mouvement : respiration
Dans le lieu, le souffle et le mouvement sont produits par le vent.




Stefan Hussong peut-il « lire » ces images filmées comme une partition ? Une partition libre comme John Cage laisse l’initiative au musicien d’interpréter, de créer son morceau de musique à partir d’une partition ouverte… les temps de silence au choix… à discrétion…




Que le musicien-interprète se fasse compositeur par ces images filmées…
Que les images filmées l’invitent à composer lui-même, avec son corps & son instrument.


02 février 2011
S.T.

Note du 06 février
Regardant à nouveau cette séquence, je constate que l'image est foisonnante.
Elle a quelque chose de vibrant, comme un feu. Cette force blottie au sein même de l'image, dans le temps imparti, cette présence physique me semble aujourd'hui contradictoire avec le silence, l'immobilité de l'hibernation. Peut-être que l'animal sort du sommeil de l'hiver, non sans quelque violence.
Cela me fait penser à Purcell, l'air de l'hiver dans King Arthur "let me, let me, let me freeze again to death", mais à l'inverse, "laissez-moi revenir à la vie, moi qui suis plein d'une nouvelle énergie. Elle sourd et ne demande qu'à jaillir…".


Acte II - Prélude
Tandis que le Génie du Froid se redresse

GENIE DU FROID 
Quelle puissance es-tu, toi qui, du tréfonds,
M'as fait me lever à regret et lentement
Du lit des neiges éternelles ?
Ne vois-tu pas combien, raidi par les ans,
Trop engourdi pour supporter le froid mordant,
Je puis à peine bouger ou exhaler mon haleine ?
Laisse-moi être transi, laisse-moi mourir à nouveau de froid.


Second acte - Prelude
While Cold Genius rises

COLD GENIUS
What power are thou, who from below
Has made me rise unwillingly and slow
From beds of everlasting snow ?
See's thou not how stiff and wondrous old
Far unfit to bear the bitter cold,
I can scarecely move or draw my breath ?
Let me, let me freeze again to death.


Zweiter Akt - Präludium
Wärenddessen erhebt sich der Genius der Kälte

GENIUS DER KÄLTE
Welche Macht bist du, die aus der Tiefe
Mich aufstehn heisst, unwillig und mühsam
Aus meinem Bett von ewigem Schnee ? 
Siehst du nicht, wie uralt und steif ich bin,
Wie ich kaum die bittere kälte ertrag',
Kaum mich bewegen, kaum atmen kann ?
Lass mich erfrieren, wieder zu Tode gefrieren. 




Note du 21 mars
Lors du Festival Traverse Vidéo à Toulouse, j'ai rencontré Dario Lazzaretto, un artiste italien qui travaille à Tokyo. Il revenait de là-bas depuis trois jours. Il n'avait pas dormi vraiment pendant la dernière semaine de son séjour à Tokyo, à cause des répliques du tremblement de terre. Il était affecté nerveusement et dans son corps, jusque dans son sommeil, par ce séisme gigantesque qui avait pourtant eu lieu au nord du Japon.
J'ai immédiatement eu une pensée inquiète pour Stefan Hussong. Mike Svoboda, le tromboniste qui joue avec Stefan (voir la vidéo "En Eglars - La toile" sur ce blog : http://santreuil-tfmc.blogspot.com/2011/01/en-eglars-la-toile_12.html),
m'avait écrit lors d'un échange de courriels, il y a une semaine environ, que Stefan tentait de rentrer de Tokyo. Stefan a dû vivre une chose très proche de Dario : les répliques du séisme qui affectent corps & âme.
Je me dis que cette expérience pour Stefan pourrait irriguer ce projet, en animant son accordéon de la menace réactivée et imprévisible qui remue les nerfs, le corps et tout l'être.

14.1.11

Etang de La Sourdaie - Vagabonde blu

12 min 30 _ I-2011
coul. _ 16:9 _ mini-dv _ 2 plans-séquences
Musique : accordéon solo : “Vagabonde blu” (1998) de Salvatore Sciarrino, extrait de l’album “Push Pull” (1999 - Hat Hut 131) de Teodoro Anzellotti (avec son aimable autorisation)




La composition de SciarrinoVagabonde blu” pour l'accordéon de Teodoro Anzellotti devient, avec les images — vibrations de la lumière sur les feuilles, les eauxl'esprit du lieu filmé. Cet esprit joue avec la technicité de l'instrument et avec celle du filmage à main levée — à-coups, heurts, tremblements.
En fin de séquence, l'instrument laisse place à un autre outil œuvrant dans le paysage hors-champ et à la musique brute des lieux.
















Extrait du livret accompagnant l'album  “Push Pull” (1999 - Hat Hut 131)
THE BREATH OF THE MACHINE IN SEARCH OF THE QUINTESSENCE OF THE ACCORDION
by Peter Niklas Wilson, june 1999

« (And) what can a composer do when faced with the challenge of writing for an instrument whose image seems so fixed, and so one-dimensional ? As Salvatore Sciarrino puts it : « The history [of the accordion] has a very intensive, strong ‘scent’, which does not interest me that much. I would not be able to compose music that goes along with it. Such a ‘scent’ is invincible. » So what can the composer do ? He can either accept the cliché and deconstruct it (as Mauricio Kagel has done so often) or he can attempt to re-invent the accordion, discover its hidden core, its secret materia prima.



In Sciarrino’s words : « I am more concerned with the substance.
The quintessence of the accordion, without this ‘scent’, can produce
a great piece of music. » But how do you define this “substance“ ?
One approach would be to analyze the fundamental mechanics of the instrument. Playing the accordion : That means pressing keys, moving the bellows to and fro, setting air into vibration in a sort of trembling motion of varying speed and intensity. Sciarrino’s
"Vagabonde blu" (1998) stages a very subtle play of these physical actions : the clicking of keys, the to and fro of the trill, and finally the pure white noise of the “breathing“ bellows :


« What I have discovered for myself is that the accordion can breathe, and that is an incredible experience. Everything vanishes, and what is left is the breath of the machine. […]
I begin with complex, vivid time elements, and what then remains is the soul, the motion. The instrument inhales and exhales, like a lung. This is not an effect, but a very different, anthropologic conception of musical langage. » »




























































Etang de La Sourdaie 
- Vagabonde blu -
séquence filmée sans la musique :

(pour des raisons techniques, pas d'extrait visible pour le moment) 






Pour des raisons de droits d'auteur musicaux 
je ne mets pas à l'écoute en ligne la pièce musicale  
Vagabonde blu (1998) de Salvatore Sciarrino, 
extrait de l’album “Push Pull” (1999 - Hat Hut 131) 
de Teodoro Anzellotti
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